Un lycée entre tradition et modernité
L'enseignement secondaire à Belfort au XIX° siècle
L’enseignement secondaire se met en place à Belfort avec l'autorisation d’ouverture d'une "école secondaire" donnée le 14 octobre 1803. Agrandie par l’adjonction d’un pensionnat, elle est transformée en Collège en 1808. Lorsque la guerre de 1870 éclate, ce collège situé Place des Bourgeois accueille environ 150 élèves et compte 9 chaires de Professeurs. Il est réputé pour la solidité de son enseignement. Belfort est alors une Sous-Préfecture du Haut-Rhin et les élèves qui souhaitent poursuivre leurs études doivent se rendre dans les Lycées de Colmar ou de Strasbourg.
La rupture de la Guerre de 1870
La résistance héroïque de Belfort face à l’envahisseur Prussien, conduite par le Colonel Denfert-Rochereau, lui vaut de ne pas être annexée à l’Allemagne comme le reste de l’Alsace. Suite au Traité de Francfort du 10 mai 1871, "l'arrondissement subsistant du Haut-Rhin", futur département du Territoire de Belfort en 1922, doit se doter d’une structure administrative, mais aussi scolaire. Le 26 juin 1871, le Maire Edouard Meny réunit son Conseil Municipal en séance extraordinaire pour adresser une lettre au Ministre de l’Instruction Publique demandant la création d’un Lycée. Au cours de la séance extraordinaire qui suit, le 8 décembre 1871, la municipalité offre le terrain situé au milieu de la verdure, sur le lieu-dit de "Bellevue", ainsi qu'une subvention de 10 000 Francs pour les frais d'administration. Mais la demande est rejetée par l'assemblée Nationale pour des raisons budgétaires. Le conseil municipal formule donc une seconde demande le 15 mai 1872 en argumentant sur l'attachement des Alsaciens pour Belfort. Dans un ultime effort financier, la municipalité offre une somme de 200 000 Francs. L'accord du gouvernement est finalement donné en août 1872, après 14 mois de démarches administratives. Une souscription est lancée dans le Haut Rhin à l'initiative d'un industriel réfugié à Belfort. Les travaux débutent en avril 1873 et durent moins de 7 mois, sous la conduite de l'architecte belfortain Pierre Cordier. Ils sont suffisamment avancés pour permettre que la première rentrée s’effectue dès le 4 novembre 1873.
La délibération du Conseil Municipal demandant la création du Lycée au Ministre de l'Instruction Publique
Les plans originaux de 1874 avec la localisation de la Chapelle, actuellement affectée au Collège Léonard de Vinci
L'ancienne chapelle aujourd'hui
Le Lycée vers 1900
Le Lycée National de Belfort
La particularité du Lycée, liée aux conditions exceptionnelles de sa création, est de ne pas recevoir de nom de baptême. Un décret du Ministère de l'Instruction Publique daté de 1873 indique, dans son article 1 que : « le collège de Belfort est déclaré Lycée National ».
Il connaît dès son ouverture un afflux d’élèves qui dépasse toutes les prévisions : de 287 dont 96 internes en 1873, les effectifs passent l’année suivante à 475 dont 238 internes, tous logés dans le Grand Lycée. En effet, dans un contexte patriotique très fort, de nombreux alsaciens viennent s’y inscrire pour faire « leur éducation et leur instruction française ». Il devient donc vite nécessaire d’élaborer un projet d’agrandissement. C’est ainsi que vient s’ajouter le « Petit lycée » en 1877.
La cour arrière, actuelle cour du collège
Les 2 Guerres Mondiales
Dès septembre 1914, à la suite des premiers combats menés en Alsace, le lycée est transformé en hôpital pour accueillir les soldats blessés au sein de l'internat. Les cours sont alors donnés au café du Soleil. Par ailleurs, le Lycée a payé un lourd tribut humain au premier conflit mondial comme l'attestent les plaques commémoratives situées sous les arcades du Grand Lycée où sont inscrits les 188 noms des élèves morts pour la France. En décembre 1918, le président de l'association des anciens élèves rend hommage à ceux qui sont tombés, confirmant alors que le Lycée de Belfort est un haut lieu de patriotisme depuis sa création :
Au début de la 2° guerre mondiale, la communauté scolaire est déplacée à Vellexon en Haute-Saône et le Lycée n'assure plus de cours. Après la chute de la ville le 18 juin 1940, la police allemande et le service des essences s'y installent le 10 août, et ce jusqu'au retour des élèves le 11 octobre 1940.L'enseignement est sous étroite surveillance du régime de Vichy et entre le 15 et le 18 novembre 1940, un officier allemand assiste même à un cours d'Histoire. Certains élèves ont toutefois des velléités d'opposition et le 15 janvier 1941, l'un d'entre eux laisse une caricature anti-allemande sur son pupitre.
Le 11 mai 1944, un bombardement allié qui visait la gare touche durement le quartier de la Pépinière. Les bombes tombent à proximité du Petit Lycée, la plus proche explosant à 75 m des bâtiments. Les vitres sont brisées par le souffle, les fenêtres sont disloquées ainsi que les cloisons. On retrouve des projectiles sur le toit et les logements des agents qui s'y situent sont inutilisables. Un enseignant qui circulait à vélo non loin de là est blessé et hospitalisé. Le Lycée ferme à nouveau.
Dégâts quartier de la Pépinière
Le bombardement à proximité du Lycée
Rapport du Proviseur du 12 mai 1944
D'août à novembre 1944, Le Lycée a été occupé par les familles de Miliciens, eux-mêmes installés caserne Vauban. Puis les libérateurs de la ville s'y installent, brûlant le mobilier scolaire pour se chauffer au cours du rude hiver 1944. A la sortie du conflit, le Lycée est en piteux état. Il rouvre le 10 janvier 1945 avec du matériel apporté par les élèves.
Le développement de la cité scolaire
Il faut attendre les années 1960 pour que de nouvelles constructions soient réalisées afin d'accueillir des fonctions jusqu’alors assurés dans le Grand et le Petit lycée : restauration scolaire et gymnase en 1964, grand bâtiment d’externat, le long du faubourg de Lyon, en 1965; terrain de sport et deux annexes du gymnase en 1968; bâtiment d’internat en 1972. Depuis, mise à part l’adjonction épisodique de « préfabriqués » démolis depuis une vingtaine d’années, l’aspect architectural n’a pas changé.
Le Lycée dans les années 1960
Le 25 novembre 1994, le Lycée, communément appelé "Roosevelt", du nom de la rue qui le jouxte, est officiellement baptisé Lycée Condorcet.
Le 4 novembre 2013, les 140 ans du Lycée sont dignement fêtés par l'ensemble de la communauté scolaire :
L'évolution de la structure pédagogique
A l’origine, le lycée assurait deux enseignements complets et distincts :
l’enseignement "classique", qui préparait aux examens du baccalauréat, alors décomposé en deux groupes es-lettres et es-sciences, ainsi qu'aux concours d’admission à St Cyr, à l'École Navale, et à l’École de Médecine et de Pharmacie militaire.
l’enseignement "spécial", devenu "moderne" en 1891, qui offrait de «fortes études» de mathématiques appliquées, de mécanique, de géométrie, de sciences physiques et naturelles, de langues, de dessin et de législation.
Après bien des évolutions, le lycée connut les réformes liées à la prolongation de la scolarité obligatoire et à la réorganisation des cycles d’enseignement. La principale rupture intervient en 1963 avec la création des Collèges d'Enseignement Secondaire (C.E.S) qui intègrent les "petites classes" des lycées, ou "Petits Lycées" (filières d'enseignement élémentaire menant de la onzième à la septième - du CP au CM2 - et réservée aux enfants d'une population privilégiée destinés au lycée et à l'université). En 1968, une classe préparatoire au professorat d’Éducation Physique et Sportive fut créée au lycée mais supprimée en 1975.
A partir des années 80, le lycée s'ouvre au supérieur et met en place plusieurs enseignements :
1985 : Section de Techniciens Supérieurs d’Informatique de Gestion
1986 : Section de Techniciens Supérieurs de Commerce International
1988 : Classe de Mathématiques Supérieures (1° année de CPGE - Classe Préparatoire aux Grandes Écoles)
1989 : Classe de Mathématiques Spéciales (P) - (2° année de CPGE)
1993 : Classe de Mathématiques Spéciales (M) - (2° année de CPGE)
En 1995, la structure des CPGE est transformée :
la classe de Sup est renommée PCSI (Physique – Chimie – Sciences de l’Ingénieur)
les classes de Spé sont renommées PSI (Physique – Sciences de l’Ingénieur) et PC (Physique-Chimie).
En 1997, une FCIL (Formation Complémentaire d’Initiative Locale) : «Conduite de Projets Informatiques» est mise en place avec l’appui de la Région. Elle accueille des titulaires d’un BTS ou d’un DUT Informatique auxquels elle donne, en alternance, un complément de formation technique et relationnelle. Cette formation donnera naissance à une licence d’informatique en partenariat avec le CNAM de Franche Comté à la rentrée 2008.
En 2001, un BTS Informatique de Gestion par apprentissage vient enrichir l'offre de formation. Ainsi, le même diplôme peut se préparer soit sous statut scolaire, soit en alternance, les étudiants ayant dans ce dernier cas le statut d’apprentis et sont rémunérés par leur entreprise d’accueil.
En 2006, le lycée a ouvert une section ABIBAC permettant aux élèves de préparer simultanément le Baccalauréat français et son équivalent allemand, l’Abitur.
En 2015, les classes préparatoires sont transférées au lycée Follereau.
En 2019, la section ESABAC est ouverte, permettant aux élèves d'obtenir simultanément le Baccalauréat français et italien.
En 2021, le Lycée accueille le PPPE (Parcours Préparatoire au Professorat des Ecoles) en partenariat avec l'UFR STGI. Les étudiants-tes préparent une Licence Administration Economique et Sociale et en parallèle, se forment dans l'optique de leur futur concours de Professeur-eure des Ecoles.
En septembre 2022, le Lycée vit un moment historique car il accueille la première Proviseure de sa très longue histoire.
Les Proviseurs du Lycée depuis sa création
1 |
1873 - 1878 |
GASQUIN |
2 |
1878 - 1897 |
SCHIRMER |
3 |
1897 - 1899 |
CARETTE |
4 |
1899 - 1902 |
DIDIER |
5 |
1902 - 1908 |
DUTHIL |
6 |
1908 - 1915 |
DESSIRIER |
7 |
1915 - 1918 |
GROS |
8 |
1918 - 1922 |
DUPUIS |
9 |
1922 - 1923 |
DODIER |
10 |
1923 - 1925 |
LOUBET |
11 |
1925 - 1926 |
CHENE |
12 |
1926 - 1929 |
GUYOT |
13 |
1929 - 1933 |
BAUDEL |
14 |
1933 - 1937 |
ROOS |
15 |
1937 - 1942 |
PICARD |
16 |
1942 - 1944 |
JULLIER |
17 |
1944 - 1945 |
DECHENAUX |
18 |
1945 - 1948 |
SCHULER |
19 |
1948 - 1955 |
COLLIN |
20 |
1955 - 1956 |
LOUYS |
21 |
1956 - 1965 |
FIGER |
22 |
1965 - 1968 |
DOMINO |
23 |
1968 - 1969 |
ROCH |
24 |
1969 - 1972 |
LE DORNER |
25 |
1972 - 1976 |
GENRE |
26 |
1976 - 1988 |
THOMAS-MAURIN |
27 |
1988 |
BOYER |
28 |
1988 - 2000 |
WAKENHUT Claude |
29 |
2000 - 2005 |
PETITJEAN Jacques |
30 |
2005 - 2011 |
LIENHARD Gabriel |
31 |
2011 - 2012 |
DUPUIS François |
32 |
2012 - 2021 |
KEMPF Didier |
33 |
2021-2022 |
BERNA Alain |
34 |
2022 |
DURST-TAILFER Corinne |
Synthèse réalisée notamment grâce aux travaux de recherche de Yves IMBERT et de Marie-Antoinette VACELET, enseignants d'EPS et d'Histoire-Géographie au Lycée durant de nombreuses années.